C’est l’histoire de Mme Jekyll / Hyde qui visite une foire et s’arrête aux stands proposant des vêtements. 

Mme Jekyll s’arrête sur un stand de confection.

C’est une marque inconnue, fabriqués en Chine ou au Bengladesh (d’après leurs étiquettes). Elle passe en revue les modèles, en tient un devant elle, demande le prix parce qu’il n’est pas clairement visible, paie sans discuter et repart. Elle ne demande ni d’où vient le vêtement, ni dans quelles conditions ou par qui il a été fabriqué, ni en quelle matière il est, ni aucune autre information.

Elle continue son chemin et arrive sur mon stand où ce panneau est placé bien visible (à deux exemplaires) dès l’entrée:

 ModeMaille 100% fait-main, unique, suisse

Et là apparaît Mme Hyde. 

Tout d’abord c’est l’interrogatoire: c’est vraiment, vraimentvraiment vous qui faites tout cela? Où, quand, comment, en combien de temps, pourquoi, avec quoi, vous êtes sûre que c’est vous-même?

Puis éventuellement  vient le tour de l’essayage: ici pas question de mettre juste devant soi. Il faut essayer toutes les combinaisons possibles et les questions continuent: c’est en quelle matière? Pourquoi vous avez / vous n’avez pas fait ça comme ci/comme ça? Moi, j’aurais préféré les manches plus courtes / plus longues, et le dos moins ceci, la custo plus cela, c’est normal qu’il y ait un col? Pourquoi l’encolure est-elle si haute / si basse? Tout doit être justifié, expliqué, argumenté. 

La question du prix n’est pas posée car il est bien visible, mais on me demande parfois si la broche de fermeture fait partie du prix (vous achetez une veste sans fermeture vous?). Et enfin vient le temps du marchandage. “Oui, mais bon, entre nous, juste pour moi, vous ne pouvez pas me faire un prix?” “Et si j’en achète 2, vous faites un rabais?” 

Il se trouve que ma rémunération à l’heure est le plus souvent ridicule. Il se trouve aussi que, quand vous fabriquez tout vous-même, le temps passé à faire une pièce ne diminue pas si une même cliente en achète deux ou une seule. Si vous voulez en découvrir plus sur ma politique de prix, c’est par ici

Je me pose réellement la question: pourquoi les artisans rencontrent-ils si souvent Mme Hyde?

Certes, la majorité des clientes ne sont pas ainsi. Elles viennent rechercher ce qui fait la richesse du fait-main: la qualité, l’accueil, l’écoute, le caractère unique des pièces et un vrai dialogue s’engage autour du vêtement et de la façon dont il peut mettre en valeur chaque personnalité. 

Mais il n’en reste pas moins qu’une partie des visiteuses de salons / foires / marchés artisanaux sont a priori beaucoup plus suspicieuses et beaucoup plus regardantes quand il s’agit de fait-main qu’elles ne le seraient dans une grande chaîne de prêt-à-porter. 

Et ce n’est pas forcément une question de prix. Si un snood à 15.- est fabriqué en grande masse dans un lointain pays, peu importe en quoi il est fait, comment on peut le laver -ni comment est rétribuée l’ouvrière qui l’a réalisé. Mais si c’est moi qui le propose, je vais devoir expliquer pourquoi j’ai choisi cette matière, ce point-là, cette forme-là, cette custo-là, le temps que j’ai passé à le réaliser, le coût de la matière première et combien je gagne sur une pièce, si il faut vraiment le laver à la main? Sans compter les essayages …. (Et ne croyez surtout pas que j’exagère, je ne parle que de faits vécus!)

Alors sérieusement, si vous avez une piste de réponse, n’hésitez pas à vous exprimer dans les commentaires, je suis toute ouïe! 

C'est à vous!